Le mensonge de la “pénurie de médecins”
Le Québec n’est pas en crise de médecins. Il est en crise de courage politique et de corporatisme médical.
🩺 La vérité qu’on ne dit jamais : le Québec n’est pas en crise de médecins. Il est en crise de courage politique et de corporatisme médical.
On nous répète que « le Québec manque de médecins », que « PL2 chasse nos docteurs », que « l’exode est imminent ».
On brandit la menace d’un effondrement, comme si le système de santé québécois ne tenait qu’à un fil.
Mais la vérité, elle, est très différente — et elle dérange :
👉 Le Québec n’est pas en pénurie de médecins.
👉 Le Québec est en pénurie d’un système moderne, où chaque professionnel peut exercer pleinement ses compétences.
👉 Et ce qui étouffe notre réseau, ce n’est pas un gouvernement trop dur : c’est un corporatisme médical verrouillé depuis 40 ans.
Dans cet éditorial, je veux expliquer clairement — sans filtre, sans simplification — pourquoi notre système est bloqué, qui en porte la responsabilité, pourquoi la population est entraînée dans un narratif qui va contre ses propres intérêts, et surtout : ce que chaque citoyen peut faire pour renverser le rapport de force.
🔎 1. Le paradoxe québécois : plus de médecins… mais moins d’accès
Les faits sont têtus.
Le Québec compte, depuis plusieurs années, autant sinon plus de médecins par habitant que l’Ontario et que la moyenne canadienne.
Pourtant :
les urgences débordent;
les délais explosent;
les patients passent des nuits entières sur des civières;
des centaines de milliers de Québécois n’ont pas de médecin de famille.
C’est complètement illogique… jusqu’à ce qu’on observe l’organisation interne du travail.
🧩 2. Pourquoi le système se brise : parce que les médecins font tout, même ce qu’ils ne devraient pas faire
Ailleurs au Canada :
les IPS gèrent la majorité des cas simples;
les infirmières évaluent les problèmes mineurs;
les pharmaciens ajustent les traitements de première ligne;
les paramédics décident si un patient doit aller à l’hôpital;
les médecins se consacrent aux cas complexes et urgents.
Au Québec, c’est presque l’inverse.
Pour une longue liste de raisons historiques, politiques et corporatives, nous exigeons qu’une énorme quantité d’actes — des rhumes, des fièvres, des P4-P5, des renouvellements, des blessures légères — soient encore évalués par un médecin.
Ça surcharge la première ligne.
Ça ralentit tout le réseau.
Ça crée artificiellement une “pénurie”.
Et ça fait croire que nous manquons de médecins, alors que nous manquons de délégation.
🔥 3. Le Centre Bell : une démonstration politique, pas un cri de détresse
La grande rencontre de 12 000 à 13 000 médecins au Centre Bell n’était pas une assemblée banale.
C’était une démonstration de force symbolique destinée à peser sur l’opinion publique.
L’objectif était clair :
se présenter comme victimes d’un gouvernement autoritaire et faire croire que le PL2 “attaque” les médecins.
Mais tout ça évite volontairement de poser la vraie question :
Qui bloque la modernisation du système depuis des décennies?
Ce n’est pas le gouvernement.
Ce ne sont pas les patients.
Ce ne sont pas les IPS ou les pharmaciens.
Les responsables sont connus — et ils se partagent le même champ de bataille depuis 40 ans.
🛑 4. Les véritables forces qui bloquent la modernisation du réseau
Il est temps de les nommer.
🔥 Le Collège des médecins du Québec
Le CMQ défend les actes réservés aux médecins.
Chaque élargissement vers les IPS, infirmières ou pharmaciens se heurte à des restrictions, des mises en garde, des limites.
C’est une structure qui défend son périmètre, même lorsque ça nuit à l’accès des patients.
🔥 Les fédérations médicales
Le modèle québécois repose sur la rémunération à l’acte.
Plus un acte est réservé, plus il est rentable.
Plus il est simple, plus il est facile à multiplier.
Retirer des actes simples, c’est retirer de l’argent.
C’est normal économiquement qu’on s’y oppose.
Mais socialement, c’est catastrophique : le médecin fait ce qu’une IPS ferait très bien, mais à prix d’or.
🔥 Les syndicats des autres professions
Il serait naïf de penser que seuls les médecins défendent leur territoire.
Chaque groupe protège sa parcelle :
les infirmières;
les pharmaciens;
les paramédics;
les inhalothérapeutes.
Résultat?
Un système où personne ne veut céder un geste, au détriment du patient.
🔥 Le gouvernement, prisonnier d’un système qu’il finance mais ne contrôle pas
Le gouvernement paie toutes les factures.
Mais :
les ordres décident des actes;
les syndicats décident des rôles;
les fédérations décident du tempo des négociations;
les gestionnaires décident des horaires.
Un gouvernement est là pour quatre ans.
Les ordres et fédérations sont là pour quarante.
C’est la racine du déséquilibre.
🔥 5. Pourquoi la population défend, malgré elle, ce qui la fait souffrir
Dans un système opaque, corporatif, technique, la population réagit à ce qu’elle voit :
➡️ un médecin qui dit être menacé,
➡️ un gouvernement qui communique maladroitement,
➡️ des mots comme “coercition” et “sanctions”,
➡️ des patients qui ont peur de perdre leur médecin.
C’est normal d’avoir peur.
C’est humain.
Mais cette peur est exploitée pour empêcher toute évolution.
Parce que dès que la population comprend les mécanismes internes, elle réalise que :
défendre les fédérations = défendre l’attente;
défendre les actes réservés = défendre les urgences bouchées;
défendre le statu quo = se tirer dans le pied;
moderniser = améliorer sa propre qualité de vie.
Ce n’est pas être “contre les médecins”.
C’est être pour sa propre santé.
🎯 6. Comment on s’en sort : les trois leviers indispensables
On peut dénoncer la situation, mais il faut aussi proposer une sortie.
Voici la stratégie réaliste pour moderniser le réseau.
✔️ Recentrer le débat sur le partage des tâches
Le cœur de la solution, c’est qui fait quoi.
Les IPS doivent pratiquer pleinement.
Les infirmières doivent pouvoir évaluer plus librement.
Les pharmaciens doivent être autonomes dans leurs suivis.
Les paramédics doivent pouvoir trier sur place.
C’est la base de tout système performant.
✔️ Utiliser la crise pour négocier l’ouverture des actes
PL2 est imparfait.
Il est coercitif sur certains points.
Mais il ouvre une brèche dans un système verrouillé depuis 40 ans.
Cette brèche peut servir à négocier ceci :
➡️ moins de coercition
en échange de
➡️ plus d’ouverture des actes.
C’est là que le gouvernement peut réellement gagner.
✔️ Bâtir une opinion publique informée
Tant que la population pense que PL2 “attaque les médecins”, le changement est impossible.
Mais si la population comprend :
que le Québec a plus de médecins que l’Ontario;
que 60 % des cas simples n’ont pas besoin d’un médecin;
que d’autres professionnels sont sous-utilisés;
que le blocage vient des structures, pas des patients;
alors tout devient possible.
C’est ici que j’intègre quelque chose que je juge essentiel :
un guide d’action citoyenne, concret, pratico-pratique, pour outiller ceux qui veulent faire partie de la solution.
🧰 7. Guide d’action citoyenne APDQ
Un outil concret pour aider à moderniser notre système
✔️ 1. Retenir et partager quatre vérités clés
Elles renversent la discussion à elles seules.
1️⃣ Le Québec n’a pas trop peu de médecins : il répartit mal les tâches.
2️⃣ 60 à 80 % des cas simples devraient être vus par les IPS ou les infirmières.
3️⃣ Ce n’est pas le gouvernement qui bloque : ce sont les fédérations et les ordres.
4️⃣ Défendre le statu quo, c’est défendre les délais.
✔️ 2. Comment parler de ces enjeux (sans se chicaner)
Trois phrases utiles dans n’importe quelle discussion :
➡️ « Comment ça se fait qu’on a autant de médecins que l’Ontario, mais moins d’accès? »
➡️ « Ce n’est pas une guerre contre les médecins. C’est une bataille pour libérer les autres professionnels. »
➡️ « Défendre les fédérations, c’est défendre son propre temps d’attente. »
✔️ 3. Comment appuyer la modernisation (facile, mais puissant)
➤ Écrire à son député
Quelques mots suffisent :
« Je veux que les infirmières, les IPS et les pharmaciens puissent pratiquer à leur plein potentiel. »
➤ Commenter sous les publications politiques
Toujours revenir sur qui fait quoi,
jamais sur les émotions ou les menaces.
➤ Partager cet éditorial
L’information circule vite quand elle est claire.
Chaque partage compte.
🧭 Conclusion — Le Québec n’a jamais été incapable de moderniser son réseau.
Il a été empêché.
Par des structures, des rentes, des privilèges, des habitudes, des modèles dépassés.
Mais la population n’est pas condamnée à subir.
Elle peut comprendre.
Elle peut agir.
Elle peut soutenir les réformes.
Elle peut exiger le partage des tâches.
Elle peut briser le cycle.
Et si elle le fait,
alors pour la première fois depuis 40 ans,
le Québec pourra enfin bâtir un système de santé moderne, efficace, humain —
et digne de ses citoyens.

